2024
Pour ce 38ème séjour à Madagascar, du 19 février au 15 mars, Christiane m'accompagne. La dernière fois qu'elle est venue, c'était il y a 5 ans, avant la découverte du cancer suivi d'une grosse opération, puis il y eut l'épidémie de Covid. Départ avec notre ami Philippe G. qui nous amène à la gare de Libramont. A Bruxelles-Midi, TGV vers l’aéroport Charles de Gaulle. L’avion est OK pour La Réunion, mais ensuite, à la porte d’embarquement, on nous apprend que le vol EWA prévu vers Tamatave est annulé. On devra attendre deux jours à l’hôtel Exsel Creolia de St Denis. C’est un bel établissement, avec des chambres splendides et une piscine magnifique. Nos repas sont pris en charge par Air austral.
Le jeudi, on part enfin. Le jour tombe à notre arrivée. Taxi jusqu’à La Véranda où notre ami Gérard nous a réservé une chambre, car il vaut mieux ne pas voyager après le coucher du soleil. Quand on voit l'état de la route, on comprend !
Le lendemain, Gérard arrive, avec un peu de retard contrairement à son habitude : il a crevé un pneu sur la route. Rien d'étonnant. On passe au Bazar be (le "grand" bazar) pour divers achats, puis chez Orange pour équiper nos téléphones portables, enfin au Super U, pour quelques nourritures. 3h plus tard, on a fait les 88 km de route, et l'accueil est chaleureux à Mahambo,
Découverte de la nouvelle maison de Felana et Elisé au campus. Elle est en voie d'achèvement. Pour le moment, ils habitent dans l'atelier.
Dès le dimanche, on rencontre les parents des jeunes pour une fête : on est 62 ! Ils ont préparé des « caca pigeon » et des chips de bananes vertes, avec diverses boissons soft.
On découvre dès le lundi 26 la confiture de Sakoamanga (à goût de prune) et les Macuba : il y a même un arbre dans le fond du jardin de ma maison, ce que je découvre seulement aujourd'hui !
Il a beaucoup plu, avant et pendant ce séjour : la boue autour de la maison rend difficile les manœuvres de rangement du scooter en sous-sol. Les activités habituelles sont au programme : baignades, cours au campus, cinéma le soir à la maison. Visites nombreuses aussi, pour du riz, des lunettes, des tongs (kappa en malgache), un cartable, etc. ou pour nous vendre quelque chose : poissons, miel, vanille,…
Divers repas chez les amis : Raoul, Fara et Faly, Gérard.
Un rat monte les escaliers : il va terroriser Christiane plusieurs nuits, mais sera capturé par un piège prêté par Fara. Est-il célibataire ou tête de file d’une grande famille ?
Voici le compte rendu de Christiane pour le dimanche 3 mars :
"Un dimanche avec Tsara Tsara. Nous décidons de célébrer le dimanche en allant assister à l’ « office » orchestré par Lavincy, pseudo pasteur et réparateur de moto. Il officie dans la nouvelle maison voisine de la nôtre, qu’il a fait construire pour son beau-frère qui travaille comme pompiste à Charleroi (ça ne s’invente pas !). La maison, toute de béton et de murs d’enceinte hérissés de pointes de fer, garnie de portes quasi blindées, détonne dans l’environnement nature et très pauvre de l’endroit. L’office se passe dans le couloir central. On y accède, après avoir montré patte blanche à des enfants. On pénètre dans une espèce de discothèque, où les gens s’agitent et se trémoussent au son de « cantiques » relevant plutôt de la musique de bal ! Le tout entrecoupé d’invocations à Tsara Tsara, censé descendre sur terre à Mahambo, sous les traits d’un fort gaillard garni de moults tatouages (dixit le pasteur). Un autre pasteur et l’épouse de Lavincy (au micro) animent l’assemblée. Le public, mixte et assez jeune, va de la grand-mère toute de blanc vêtue à divers enfants et bébés qui dansent avec entrain. Point positif : on ne réclame apparemment pas d’argent mais tout cela joue sur la crédulité des gens dans l’attente du sauveur (on signale déjà miracles et résurrections !). Bref, cela ne mange pas de pain, c’est pittoresque et amusant, mais… on doute fort que la moindre spiritualité s’y retrouve. Pour nous, c’est encore une occasion d’approcher le monde des Malgaches toujours un peu opaque pour nos esprits occidentaux rationnels".
Le niveau des élèves du lycée est très bas : les redoublants Chryno et Rody sont parmi les premiers de leurs classes respectives, mais aucun des élèves n’atteint la moyenne de 10/20. De là à penser que les 150 élèves des deux classes de Terminale au lycée y sont pour l’apport financier qu’ils procurent à l’école (30 euros/an par élève), on est tenté de franchir le pas. Nous prenons dès lors des décisions pour l’avenir, communiquées aux parents le dimanche 10 mars :
- Le but premier du campus est le collège et l’acquisition des savoirs de base (lire, écrire, calculer) ;
- On ne passe pas au lycée automatiquement, mais seulement si les résultats au BEPC, à la fin de la 3ème au collège) sont franchement bons. En effet, il existe aussi la possibilité d’acquérir des compétences techniques grâce aux activités de formation qui auront lieu à l'atelier (couture, cuisine, menuiserie, toiture, électricité avec Elysé);
- On ne redouble pas la terminale, pas plus que les autres années d'ailleurs ; rappelons qu’il faut réussir (avec au moins 10/20) et être dans la première moitié de sa classe pour rester au campus. Sinon, on laisse sa place et sa chance à un(e) autre ;
- Ne pourraient envisager des études supérieures que les élèves ayant un (très) bon résultat au BAC, et un parrain vazaha… difficile à trouver !
Pour pallier cet état de choses, nous décidons de mettre en place des « cours particuliers » à financer. Ils seront assurés par Felana et Elysé, au profit des jeunes ayant un potentiel scolaire réel.
Autre moment saillant de ce séjour riche en événements : Fara et les jeunes ont organisé une petite fête chez nous pour l’anniversaire de Christiane le 6 mars.
Un homme fait affaire avec Vavrina pour récolter les graines des palmiers du jardin. Il va couper la grosse grappe de graines (qui ressemblent à des châtaignes) au sommet des palmiers à l’aide d’une échelle originale : un très long bambou le long duquel il a fixé perpendiculairement des petits morceaux de bois sur lesquels mettre ses pieds. Vavrina négocie avec lui, et profite de cette petite rentrée (2.000 ar. /grappe x 4, soit 1,6 euro).
Après les avoir fait bouillir longuement pour les amollir, ces fruits sont écrasés entre des bois sur lesquels on marche péniblement : le jus s'écoule très parcimonieusement dans un bassin puis est stocké dans des bidons, qu'on vendra 1 € le litre. Ce travail pénible est bien mal payé !
Très contente de Vavrina, une perle pour les repas, l'entretien du linge et la maintenance de la maison, Christiane souhaite que nous nous associions pour refaire sa maison (qui de toute façon nécessitait des réparations) en la surélevant pour éviter le pourrissement du bas à cause des fortes pluies fréquentes. Quelques jours seulement après notre départ, elle nous envoyait cette photo : Faly n'a pas traîné pour entamer les travaux (démolition de son ancienne maison et nouvelles fondations).
Vu le refus de la société Welight d'installer l'électricité communale (voir le compte rendu précédent), je finalise l'achat d'un kit solaire pour l'atelier. Grâce à Elisé, qui est parti à Tana - il faut 3 jours aller/retour ! - pour l'acheter à bon prix, il sera installé, par sécurité, dans leur nouvelle maison : les grands panneaux (2 x 200W), le régulateur, la batterie et le convertisseur sont suffisamment puissants pour alimenter les machines à coudre et les batteries rechargeables en petite menuiserie, mais aussi leur ordinateur portable.
La veille de notre départ, on transporte à Mitsinjo les deux machines à coudre offertes par Geneviève et François BLEU (voir le précédent compte rendu fin 2023) et Felana et Elisé nous invitent , avec leurs parents et des cadeaux, à l'inauguration de leur nouvelle maison
Retour à Tamatave avec Christian Quatrehomme, un ami de Raoul et Gérard. Au resto de La Terrasse, Christian, venu chercher sa compagne, nous apprend que l’avion EWA est de nouveau annulé et reporté au jeudi. Air austral nous loge à l’hôtel Splendide, qui n’a de splendide que le nom… établissement bling bling et souvent défectueux (chasse d’eau, air conditionné en panne, etc.). La Chine clinquante dans toute sa splendeur, mais le personnel est, heureusement, très aimable.
Petites courses en ville, en tuk tuk (réparation de mes lunettes au bazar be pour une bouchée de pain), puis vélo-pousse : pour trouver un baume après piqûre de moustique et réparer la boucle de ma ceinture, notre conducteur nous a conduits bien loin, où toutes sortes de petits artisans réparent à peu près tout, à même le trottoir. Dans cette partie de Tamatave, l’état des routes est invraisemblable (trous, bosses, flaques) : pour les vélo-pousse c’est un calvaire, alors que le président, dans la même ville, a construit un énorme parc de loisirs appelé « Miami beach » : c’est inconcevable, commente Christiane, de faire fi à ce point des besoins élémentaires de son peuple. A Mahambo, elle avait écrit, alors que nous venions d'aller au centre du village pour 2.000 ariary ( = 40 centimes d'euro) aller-retour pour nous deux:
"Le vélo-pousse, ce sont des engins avec une roue avant et deux roues arrière, supportant une cabine deux places protégée par une toile en tissu ou en plastique. Le tout est mis en mouvement grâce à un cycliste vigoureux, pieds nus le plus souvent. Une chaîne simplement, mais pas de changement de vitesse. Ce lundi de grande pluie, c’est un homme déjà âgé qui nous véhicule jusqu’au marché. Il faut pas mal d’énergie et d’adresse pour propulser l’engin entre les trous pleins d’eau de la route. Ne jamais dire que les Malgaches sont fainéants ! On les voit travailler durement, dans des conditions très difficiles, et le coût de la vie qui augmente sans cesse !"
Voici les élèves actuels logés à Mitsinjo, présentés par classe au CEG (collège) et au lycée :
Retour à la maison sans problème, y compris avec le TGV… sans billet valable (acheté à l'avance, il était périmé de deux jours à cause de l’annulation du vol). Notre ami Philippe est à Libramont pour nous ramener au bercail.
Fin mars, quelques jours après notre retour, nous recevions à la maison Geneviève et François Bleu, occasion d'une photo avec les cadeaux reçus à Mahambo.
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39ème voyage à Mada (du lundi 13 mai au jeudi 30 mai 2024)
Je suis retouné à Mahambo en mai, alors que j'étais rentré fin mars de mon précédent séjour avec Christiane. J'avais hâte de revoir les amis et les jeunes du campus Mitsinjo. Un court séjour... mais une fin laborieuse, comme vous le lirez plus loin, dont les effets négatifs ont retardé ce compte rendu.
Voyage habituel sans problème, en 5 étapes : train ordinaire de Libramont à Bruxelles midi + TGV de Bruxelles midi à l’aéroport Charles de Gaulle ; gros avion Air austral jusque La Réunion + attente pendant 5h ; petit avion EWA jusque Tamatave ; souper et nuit + petit déjeuner à l’hôtel La Véranda et achat d’un forfait Be connect Orange pour 7 jours (9.500 ar.) , emplettes, notamment d’artisanat au bazar be puis quelque provisions de nourriture à Super U ; trajet en voiture (il faut 4h) avec Gérard jusque Mahambo, où j’arrive le mercredi en début d’après-midi. Accueil par Vavrina, mais aussi Fara et Faly, Felana et Elysé. Première baignade, avec le scooter qui va bien, dans une mer un peu tourmentée mais quand même agréable. A 18h15’, les élèves sont là pour le premier film, le dessin animé « Madagascar ».
Dès le lendemain, leçon de science au campus, entre midi et 13h : la vie des végétaux. La nouvelle maison de Vavrina, au fond de mon jardin, est impeccable.
Il fait noir tôt. Il pleut beaucoup aussi et la piste a souffert en contrebas du CEG. Suzy, de l'autre côté de la RN5, a regagné sa maisonnette, et les balawas (ragots) avec Vavrina vont bon train. Jean-Cola passe et me montre ses travaux sur la tablette Samsung reçue : c'est le texte de motivation pour son choix de la section « gestion et informatique ». Petits travaux de Paul gasy, mon ancien gardien, notamment une nouvelle serrure pour la porte du garage du scooter, afin d’avoir plusieurs clés. Kamisy et Evariste sont embauchés pour du nettoyage de terrain et de la végétation trop exubérante (dégagement du litchi).
Après « Madagascar », « Les temps modernes » (Charlot) en cinéma pour les jeunes. Le lundi 20 mai (congé de Pentecôte), pique-nique avec les élèves sur la plage devant chez Véro, avec l’autorisation de Rakoto : jeux et danses, animés par Elisé.
Vavrina est partie à Fénérive avec Norosoa, Fara et Françoise, pour l’accouchement de Mamymarinette : le bébé fille s’appelle Maéli.
Le temps est toujours venteux, pluvieux et froid : un petit pull est bienvenu le soir. Après Charlot, « Ratatouille » a du succès. Au campus, leçon sur les 5 sens + le temps (aux deux sens du mot). Le scooter a du mal pour être sorti de dessous la maison, à cause de la boue qui l’encercle. Moyennes et pourcentages au campus.
C’est le lundi 27 mai que je tombe avec le scooter près de la maison (il y avait un vélo-pousse dans le passage étroit) ; je me réveille à l’hôpital de Mahambo, après évanouissement (pendant une demi-heure), où un médecin m’a mis un bandage au front et trois fils + un pansement au genou. Fara est là, ainsi que Vavrina, Felana et Elysé, Raoul, bref, mes anges gardiens. Ils appellent Gérard, qui me conduit à Fénérive en un peu moins d’une heure, pour faire une radio de vérification. Ok, pas de caillot ni de félure crânienne. Retour à la maison et déjeuner puis repos ; dîner avec gros caranque acheté par Fara, qui s’occupe de mes médicaments.
Sieste et coup de fil à Christiane, qui enverra mes radios à Nicolas. Pour la maison Bruno, qu’il faut réparer entièrement, je donne 800.000 ar. à Faly.
Le lendemain, dernier repas chez Raoul avec José le puisatier.
Départ le mercredi 29 mai à 6h avec Gérard. Je tiens le coup tout le reste du voyage (grâce à l'adrénaline ?), qui se passe heureusement comme prévu. Christiane est le jeudi midi à Libramont. Je m’écroule de fatigue dans le fauteuil à la maison. A cause d'un mal à la tête persistant, visite chez le Dr Elena Luxen le vendredi, qui m’enlèvera les fils lors de ma 2ème visite le lundi. J’ai maintenant toute la tête cocardée du côté gauche.
Par prudence, la doctoresse me conseille un scanner qui a lieu le 5 juin et montre des hématomes subsistant dans la tête. 2ème scanner le mercredi 12 juin : les hématomes se résorbent, mais lentement. Ce n'est pas terminé après presque 2 mois : coups de fatigue fréquents, pertes d'équilibre encore accentuées, bref il me faut être patient.
Depuis lors, les bulletins de la fin d'année scolaire sont arrivés et, chez Geneviève et Jean-François Bleu à St Sauveur de Cruzières, nous décidons d’être fermes sur les nouvelles règles : 5 élèves ne satisfont pas : Florita, Leonchan et Angelito (6ème) ; Jhovannit (5ème) ; Felicia (4ème). Malgré ma tristesse, ils sont écartés pour la nouvelle rentrée scolaire, que prépare déjà Fara. Je retournerai à Mahambo en novembre, après Geneviève et Jean-François, qui seront présents fin août, pour préparer avec Fara et Gérard la nouvelle rentrée.